Fallait pas être nul en théo pour suivre….
Mardi 24 janvier, Jean Marc Aveline intervient au Parvis sur Paul Tillich dans le cadre du cycle théologie pour les nuls… et les autres. J’étais vraiment le « bon client de base », je veux dire « la nulle de service ». Tout au plus savais-je associer au nom « Tillich » le titre d’un livre Le courage d’être ... Faut-il ajouter que je ne l’avais pas lu complètement ? C’est dire le degré O de mon point de départ.... Alors , c’est qui, vraiment, ce Paul Tillich ?
Jean Marc Aveline est prêtre, Directeur de l’Institut Catholique de la Méditerranée, ce qui ne laisse pas forcément supposer l’impressionnante et intime connaissance de Tillich qui est la sienne. Un prêtre catholique qui parle d’un théologien protestant avec autant de finesse, de profondeur et d’intimité du texte et de sa pensée, voilà qui n’est pas banal ! Il parle d’abondance, sans note. Abondance qui résulte d’un long cheminement en compagnie de Tillich et sa théologie. Et il nous raconte la vie d’un homme, étroitement imbriquée à sa théologie, et réciproquement, et développe sa cohérence, ainsi que les évolutions de sa pensée et de sa théologie.
Voilà donc Paul Tillich, fils de pasteur, né en Allemagne en 1886. Deux grande ruptures dans sa vie. La première : la guerre de 14 qu’il fait en tant qu’aumônier. Là, lui, l’enseignant , l’universitaire constate que le peuple ne comprend ni les mots ni les concepts de la foi, ce qui l’oblige à trouver un vocabulaire qui ne soit pas incompréhensible, et le conduira à chercher comment dire la foi de manière à être entendu, dire la foi dans sa culture...
Deuxième grande violence : l’exil au États Unis en 1933, imposé par le fait de son opposition déclarée au national socialisme. Là, une nouvelle carrière d’enseignant s’ouvre à lui, qui finira par prendre une dimension internationale. Les Américains l’apprécient car c’est un des rares théologiens qui maîtrise l’histoire de la théologie protestante et la mette en perspective. Pendant la guerre, depuis les Etats Unis, il entre en résistance, envoyant des messages en allemand au peuple allemand.
Sa théologie fut sans cesse confrontée à des problèmes nouveaux, qu’elle n’avait pas choisis. A l’écoute des questions de son temps, en dialogue avec les penseurs de son temps, elle en a été profondément influencée.
Dans cette démarche, la rencontre avec les religions est essentielle. Elle relativise le christianisme, et le conduit à relever le défi de sa propre remise en questions par les autres religions. Entretenir en moi le dialogue entre mes certitudes et le doute, les questionnements des autres religions, introduire le doute dans l’art de croire devient la garantie de ne pas basculer dans le dogmatisme et l’absolutisme. Fondamentalement, Paul Tillich a une grande confiance dans l’aptitude du christianisme à se laisser traverser par les questionnements des autres religions, ce qui lui donne une dimension universelle, même s’il lui est arrivé de devenir excluant par peur de l’autre et de l’altérité.
L‘œuvre de Paul Tillich est peu connue des milieux francophones, d’autant moins que beaucoup n’a pas été publié. Si ce bref compte rendu, imparfait et parcellaire, vous donne envie d’y aller voir vous même, il aura atteint son objectif ! Facile : Jean Marc Aveline vient de publier Paul Tillich (Collection "Artisans du dialogue", chez Publications Chemins de Dialogue), aussi facile à lire que sa conférence était agréable à écouter !
Evelyne Fréchet