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Le Parvis du Protestantisme - Le Blog
26 avril 2012

Quand le coeur parle à la tête

P1150462Dans le cadre du déjeuner-débat du mardi 24 avril 2012 de 12h20 à 13h40, l’invité du jour Jean-Claude PICAL, Directeur du Centre gérontologique des Bouches-du-Rhône à Marseille, a parlé de : "La filière gériatrique à Marseille ; une belle idée !" Le débat fut animé par Thierry Scholler, Responsable du Parvis du Protestantisme.

Avec ces trois notions de filière, territoire et partenariat au service des personnes âgées, Jean-Claude Pical nous a apporté beaucoup d’humanité, d’espérance et d’amour de l’autre.

Comme l'a rappelé Thierry Scholler, Jean-Claude Pical est un homme du service public qui, depuis 2005, consacre ses compétences humaines et professionnelles aux personnes âgées, celles que l’on recense officiellement et… les autres : celles dont on ne s’occupe pas. Il s’agit par exemple des personnes de plus de 80 ans, sans domicile fixe ou des vieux migrants à qui il faut apporter un accompagnement. L’invité du parvis s’est attardé sur la logique des filières : un regroupement sur un même site d’un ensemble de réponses pour accompagner le vieillissement.

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Dans ce parcours, il est important de respecter la personne dans sa dignité et dans son intégralité. Chaque cas appelle une réponse différente, adaptée aux phases successives du vieillissement. Nous ne sommes plus à l’époque du mouroir de 1950 de Montolivet ! Le problème du vieillissement en France concerne au niveau national 6 millions de français ayant dépassé 75 ans. Le nombre de lits n’atteint que 600 000, soit 10% des capacités d’accueil (à Marseille 12 %). « Etudier le vieillissement et ce qui peut être réalisé demande une très grande modestie ». Son organisme a lancé un programme de prévention de la dépendance, pour éviter une vision fataliste du vieillisssement? Ce programme de sensibilisaion à cette question s’articule sur quatre journées :

- une journée pour les troubles de l’audition

- une journée sur les accidents de la vie courante (12 000 décès de personnes âgées par an, suite à des chutes et autres accidents domestiques – l’aménagement de l’habitat contribuerait à en limiter le nombre)

- une journée sur la promotion de l’activité physique (une étude universitaire révèle que l’un des secrets d'un vieillissement réussi consiste à maintenir une activité physique correspondant à ses facultés et une activité cérébrale comme les mots croisés, la pratique des arts, etc.). Même les handicapés physiques peuvent trouver un exercice leur correspondant. Ces deux activités « physique et mentale » doivent correspondre au choix de la personne.

- une journée sur la sécurité routière pour les 65-85 ans (revoir le code de la route et faire des simulations de conduite)

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Dans tous les cas de figure, c’est sur du concret qu’il faut travailler et en amont. La prévention est au cœur de la problématique d’un bon vieillissement. Une convention de partenariat a été signée avec la MACIF et les portes sont ouvertes à d’autres mutuelles pour élaborer un vaste projet de prévention. C’est ainsi qu’une consultation gratuite avec un gériatre est proposée aux jeunes seniors pour diagnostiquer les problèmes qui pourraient se poser plus tard à eux, compte tenu de leurs antécédents familiaux, de leur mode de vie, de leurs activités ou de leur absence d’activités. Grâce aux réseaux gérontologiques (une équipe pour 4 arrondissements), et pour affronter les problèmes de mémoire, de solitude, de captation d’héritage, une réponse médico-sociale est apportée en liaison avec le professionnel de terrain qu'est le médecin traitant. Le portage de repas, la consultation d’un dermatologue, un véritable lien social sont proposés.

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Jean-Claude Pical a ensuite évoqué la maladie d’Alzheimer : 1,5 % de la population est concerné, soit un à un million et demi de citoyens. Ce chiffre ne peut que progresser compte tenu de l’allongement de la durée de vie. Tout est pris en compte pour permettre au patient et à son entourage - famille, aidants - d'aborder cette étape de vie si douloureuse. Toutes les compétences, les ressources, les moyens, les expériences des différents acteurs et partenaires associatifs et institutionnels concernés et enfin les études médicales en cours donnent à espérer et à croire en des lendemains meilleurs. A Marseille, en particulier, notons qu’il existe :

- un accueil de jour qui permet à la personne malade de quitter son lieu de vie et d’y revenir le soir, sans l’infantiliser, et dans le but d’alléger à la fois la détresse du malade tout en lui permettant de développer la stimulation cognitive et de soulager l'aidant qui peut aller et venir dans la sérénité. Cette solution évite aussi longtemps que cela est possible l’institution collective, si traumatisante, avec la perte de ses repères de vie. Nous sommes loin des terribles années 50, celles des dortoirs imposés aux pensionnaires.

- un accueil de jour n°2 qui prend en charge les patients les plus atteints.

A noter que nous sommes les premiers en région Provence Alpes Côte d’Azur à proposer ce que les Canadiens et les Belges appellent – non sans humour – le balluchonnage : il s'agit de permettre à un aidant de s'absenter quelques jours (pour faire une pause, pour une intervention chirurgicale, pour aller passer quelques jours en vacances chez ses enfants...) en le remplaçant dans son activité d'aide au patient atteint d'Alzheimer, de nuit comme de jour. Le remplaçant (de fait, il s'agit bien souvent d'une équipe qui effectue des roulements) prend ainsi son "balluchon" pour s'installer au domicile du patient pour une courte durée.

StatlerAndWaldorfCe que Jean-Claude Pical a très bien montré, c'est la spécificité de la prise en charge des personnes âgées : qu'elles soient en bonne santé ou non, il semblait en effet nécessaire de rompre avec les pratiques d'infantilisation des vieillards. La perte d'autonomie ne doit pas rimer avec la perte de l'estime de soi. Le traumatisme provoqué par un emménagement dans un nouveau cadre de vie, comme, par exemple, une maison de retraite peut être atténué par des mesures assez simples : permettre au résident d'avoir une clé pour verrouiller la porte de sa chambre, frapper avant d'y entrer, lui apporter le courrier, l'autoriser à garder un petit animal de compagnie et à apporter du mobilier personnel... Tout cela concourt à atténuer le choc causé par la perte de repères personnels et à favoriser l'appropriation de la maison de retraite comme domicile de substitution.

Enfin, Jean-Claude Pical estime qu'« il faut ramener l’hospitalisation de la personne âgée à sa juste place, ce qui demande à la fois une gestion de l’entrée et de la sortie ainsi que le renforcement du rôle des réseaux sociaux ». Trop d'hospitalisations pourraient être évitées ou écourtées pour qu'on ne tente pas d'agir sur ce point !

Bien d'autres questions ont été abordées au cours du débat : que faire lorsque la fin de la vie apporte son lot d'évènements tragiques - décès du conjoint, par exemple - et que l'envie n'est plus là ? La réponse ne saurait être alors uniquement technique et médicale. Une aide psychologique semble alors indispensable pour retendre un ressort de vie. Comment, dans une ville très étendue comme Marseille permettre un rapprochement des services dans les quartiers pour éviter que les personnes âgées ne soient empêchées d'y accéder, faute d'avoir un rayon d'autonomie suffisant ? Ne doit-on pas penser à l'avenir l'urbanime en y incorporant aussi cette dimension ? Autant de thèmes qui montrent bien que l'approche intégratrice de ces questions dans une démarche de réseaux est la bonne, et qu'il faut encore la développer.

Enfin une remarque s'impose pour terminer : l'enthousiasme et le professionnalisme de Jean-Claude Pical, ni l'usage qu'il fait des euphémismes pour désigner les vieux, ne sauraient néanmoins nous faire oublier une chose : la vieillesse est perçue dans nos sociétés comme un problème à résoudre, et cela en dit long sur la réalité vécue par "nos vieux" ! On ne peut qu'admettre qu'il y avait quelques progrès à faire dans la manière de prendre en charge la fin de vie dans le respect de la dignité des personnes. Mais ne peut-on craindre une déresponsabilisation des familles et des vieux eux-mêmes, qui ont subi l'injonction de ne pas vieillir, de rester jeunes jusqu'au bout et qui finissent par lâcher prise, in fine, à la fois trahis par leur corps et trahissant eux-mêmes l'idéal imposé ? La question est moins de savoir si l'on doit bien vivre sa vieillesse que de savoir si on doit bien l'accepter ! La regarder en face, l'affronter.

jeunesEt c'est en quelques sortes le projet des Babayagas : ces femmes ont imaginé une maison pour vivre une vie solidaire et responsable, avec des moments de vie collective décidés par les résidentes elles-mêmes pour pouvoir rester autonome et sujet, acteur - actrice - de sa propre vie le plus longtemps possible.

La maison des Babayagas

Allez faire un tour sur leur site : vous en concevrez l'idée que la vieillesse n'est peut-être pas toujours un naufrage, que l'on peut aussi échapper de manière intelligente à la solitude qui est parfois le lot des vieux - le plus souvent des femmes - en recréant du lien social et en envisageant une prise en charge autonome et responsable de notre propre vieillesse comme de celle de nos proches.

 Solange Strimon

Fabienne Chabrolin

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S
Cette approche du senior respecté, considéré, avancé en âge,en difficultés, seul dans la rue, ou en famille, en institution ou en maison de retraite, devrait d'abord être enseignée aux parents, aux enseignements, aux médecins et à tout ce qu'il est convenu d'appeler les travailleurs sociaux, sans perdre de vue que la retraite étant généralement la moitié du salaire demandé pour une admission dans une maison de retraite,dans le meilleur des cas,le vieillard ne dispose parfois que de 500 € et QUI VA PÄYER LA DIFFERENCE ? LES ENFANTS AU CHOMAGE, le ou la compagnon-compagne qui ne peut déjà qu'assumer très difficilement sa propre vie ? Il faut absolument passer aux solutions intermédiaires qui donnent aux résidents l'impression de vivre corectement leur fin de parcours de vie. C'est le doux rêve que je poste avec les brins de muguet pour toutes et tous.
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