A Marseille, le clientélisme n'est plus roi !
Il suffit de prononcer les mots "corruption" ou "clientélisme" au cours d'un déjeuner marseillais pour essuyer une salve d'anecdotes attestant de la gangrène qui ronge notre ville : plus que d'autres, Marseille peine à se laver du soupçon de malhonnêteté atavique.
Mais il faut bien le reconnaître : le constat que dresse Laurent Lhardit à propos du parti socialiste des Bouches-du-Rhône est sans appel ! Le "système Guérini" n'est pas une affaire d'amateur : transformer un parti de militants convaincus en un repère d'obligés des élus du Conseil Général est une illustration du changement d'échelle par rapport à la corruption ordinaire qui sévit sous d'autres cieux.
Peut-on quantifier le clientélisme ? Savoir que 44 des 80 membres élus au conseil fédéral du parti socialiste des Bouches-du-Rhône sont directement salariés ou conjoints de salariés du conseil général vaut son pesant d'or ! Laurent Lhardit estime par exemple que les "militants de conviction" représentent environ le quart de l'effectif total des adhérents de la fédération.
"Allégations mensongères !" crieront les uns ! "Propos diffamatoires servant la droite à bout de souffle", diront les autres ! L'ennui, c'est que Laurent Lhardit... est un membre du parti socialiste, un "militant de conviction" qui, avec d'autres, anime "Renouveau PS 13". Ce collectif de militants socialistes, créé en septembre 2010, s'est donné pour mission d'étudier qauntitativement et qualitativement le clientélisme au sein du parti socialiste dans les Bouches-du-Rhône. Avec un objectif clair : faire le ménage interne pour être crédible lorsqu'il faudra dénoncer en externe ces pratiques qui ne concernent pas que le PS. L'UMP, les syndicats ont eux aussi recours à cette façon si particulière de remercier leurs "clients" pour un bulletin de vote ou un emploi.
On ne serait pas loin du "Tous pourris" si l'on n'entendait pas dans les propos de Laurent Lhardit des accents d'espoir : celui de voir enfin mis à mal le "système Guérini" à la faveur de l'affaire du même nom qui plombe l'aile du locataire du conseil général ; et s'il venait à chuter, peut-être entraînerait-il avec lui un certain nombre de ses imitateurs !
On se prend alors à rêver : que notre ville si pauvre, vivant plus durement que d'autres la crise qui frappe l'Europe, soit enfin entendue, que les politiques se donnent pour objectif de vraiment lutter contre la pauvreté et la précarité - en somme, qu'ils fassent ce pour quoi ils ont été élus : réfléchir pour agir ! - voilà qui conviendrait à beaucoup !
Mais il reste au fond de nous un petit pincement, un doute insidieux : et si c'était trop tard ? Et si la politique avait dit son dernier mot ? Et si les citoyens avaient définitivement décidé de se passer non de l'action politique mais de ceux qui l'ont récupérée à leur profit... Bref : et si l'indignation de la société civile était à son comble, quelle action politique et collective en résulterait ?
C'est peut-être à cette question que "Renouveau PS 13" devra un jour répondre !
Fabienne Chabrolin
La caricature qui illustre cet article est à nouveau de Deligne : un dessinateur réjouissant dont le talent orne les pages du web-hebdo. A découvir sans modération !